J -169
Deux tubes dans un Kangoo
Dans son rétroviseur,
l’homme distingue deux cylindres de tailles semblables dans la voiture qui le
suit.
Un derrière le
volant. L’autre sur le siège passager. Une grille anti-chien les sépare de l’arrière
de l’habitacle. Une masse de poils, langue pendante et bave qui coule, doit
surement dormir sur le plancher en tôle du véhicule lancé à pleine vitesse sur
l’autoroute des retours.
Le cylindre de gauche
pivote vers celui de droite. Un trou rond se forme et s’agite. Celui de droite
ne bronche pas. Ses lunettes de soleil demeurent fixées sur le macadam qu’avale
sa camionnette. Peut-être n’a-t-il rien entendu ? C’est bruyant ces
machines-là, surtout à haute vitesse. Ou alors, les années passant, a-t-il
perdu l’habitude d’écouter le gargouillement qui jaillit du tuyau voisin, euh,
voisine. En effet, le cylindre de gauche se termine par une masse blonde en
forme de cigarette à bout filtre sous laquelle s’accrochent des lunettes de vue
à la féminité peu discrète, mais affirmée, d’un sigle de grand couturier. L’extrémité
du tube de droite n’a rien à lui envier. Il forme une plaine sans la moindre
trace de pilosité, une calvitie qui chapeaute le cylindre glabre et sans aucune
rupture d’un bouchon de liège, ces petites choses qui font si souvent pétiller
les lunettes de soleil.
Le cylindre de gauche
regarde de nouveau devant lui, le trou se comble, à droite rien n’a bronché. Le
Kangoo continue sans fin sa course folle dans le jour qui décline.
Josette et Lucien rentrent
de weekend (avec Médor).
Portraits volés de la
fin du monde
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