mercredi 20 septembre 2017

"Une trajectoire dorée", une nouvelle de SASSA



Quel parcours depuis l’Irlande !

Hier soir, le Premier ministre a confirmé ma nomination. Je suis le deuxième écossais à occuper ce bureau. 

J’aime la vue depuis cette fenêtre. Elle donne sur la nuit toujours brumeuse du cœur de Londres. Des lampadaires aux formes hors du temps y brillent tels des phares qui guident la barque de notre destinée.

La table en acajou et cuir burgundy vert de mon prédécesseur est restée là. Ces années ne prêtent guère aux dépenses inutiles. J’ai posé dessus un cadre au centre duquel est fixée une disquette informatique, unique souvenir de mon passé. À présent, seul l’avenir m’intéresse. 

Des ennemis nous guettent de toute part. La Russie n’a pas disparu. Le dragon chinois déploie ses ailes. Les États-Unis nous abandonnent un peu plus chaque jour. Quant à l’Europe, notre politique y a réduit considérablement notre influence et nos soutiens. 

 

Entrer dans ce bureau signifie se rapprocher aussi de la sortie, je ne l’oublie pas, j’espère simplement perpétuer la tradition de grandeur de mes prédécesseurs.

La tâche ne va pas être aisée, car les finances du service ont subi des coupes plus sombres encore qu’un loch des Lowlands. Pour nos gouvernants, le MI6 et à fortiori son budget n’ont plus de raisons d’être. À leurs yeux, seuls comptent les gigantesques antennes qui écoutent en permanence les frémissements de la planète, les ordinateurs géants qui traitent des millions de données chaque jour et les logiciels qui décident dans leur obscurité binaire de « notre » futur. L’homme n’a plus sa place dans leur vision du monde du renseignement. OO7 est mort, l’informatique l’a remplacé.

Gardien du temple, je resterai aux aguets et maintiendrai cette maison opérationnelle, dussè-je pour cela organiser des visites payantes de ce bâtiment, voire en louer des espaces pour des évènements festifs. Créer un nouveau lieu à la mode pour des défilés haute couture, mes agents en seraient ravis, mais qu’en penserait Sir Smith-Cumming, le premier « C » ?

Un jour prochain, ces adeptes d’une politique à quatre sous prendront leurs erreurs en pleine face et ce jour-là ils se montreront fort heureux quand le MI6 leur sauvera la mise.

Debout dans la lumière de l’aube, je me verse un verre de cet admirable whisky que mon prédécesseur a eu l’élégance de laisser avant de partir. 

Dans mes yeux, un jour nouveau se lève.


A suivre... mercredi prochain



Si cette nouvelle vous a plu, n'hésitez pas à retrouver mon univers dans "BONS BAISERS DE DUBAÏ"  suivi de "BONS BAISERS DE JAKARTA" 600 pages de suspense : De nos jours, la course folle de deux agents de Sa Majesté pour éviter un conflit majeur. Action, dépaysement et humour garantis. Existent en version électronique ou papier.





2 commentaires:

  1. Yesss... La nostalgie des espions sur la pente déclinante. Me fait penser un peu à John Lecarré... Ou au bureau de M. avec ses aspidistras (cf Bons Baisers de Russie...).

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. La pente, la pente... mais n'oublions jamais que Angus Young will return !
      Merci Sylvain

      Supprimer